Vous avez soudainement l’impression de mâcher une pièce de monnaie ? Ce goût métallique persistant dans la bouche n’est jamais anodin. Il peut être le signe d’un trouble bénin… ou d’une condition médicale plus sérieuse. Appelée dysgueusie en langage médical, cette altération du goût touche des millions de personnes chaque année. Parfois passagère, parfois chronique, elle mérite d’être décryptée. Car derrière ce symptôme discret se cachent souvent des causes profondes : infection, médicament, carence, ou exposition toxique. Voici ce que vous devez savoir pour agir à temps.
Dysgueusie : quand le goût vous joue des tours
Le terme dysgueusie désigne une perturbation du sens du goût. Elle se manifeste par l’apparition de saveurs anormales — souvent amères, acides ou métalliques — en l’absence de tout aliment responsable. Ce phénomène peut être temporaire ou durable. Il affecte autant les femmes que les hommes, à tout âge. Dans certains cas, il est associé à une diminution globale de la perception gustative. Le cerveau reçoit des signaux erronés. La langue devient un terrain de confusion sensorielle. Et ce n’est pas seulement désagréable : c’est un signal d’alerte.
Problèmes bucco-dentaires : la première piste à explorer
Les gencives saignantes, les infections dentaires ou les gingivites sont des causes fréquentes de goût métallique. Le sang, même en très petite quantité, libère du fer qui active les récepteurs métalliques sur la langue. Si vous remarquez des gencives rouges, gonflées, douloureuses ou un saignement au brossage, consultez rapidement un dentiste. Un simple détartrage ou un traitement localisé peut suffire à faire disparaître le symptôme. Une hygiène bucco-dentaire négligée favorise l’accumulation de plaque et d’inflammation — terrain propice à ce type de désagrément.
Infections ORL : un effet secondaire courant
Un rhume, une sinusite ou une otite moyenne peut provoquer une distorsion du goût. Les voies nasales obstruées perturbent la communication entre odorat et goût. Or, ces deux sens sont intimement liés. Lorsque le mucus stagne, il modifie la chimie buccale. Des composés issus de l’inflammation peuvent induire un arrière-goût métallique. Associé à une congestion, une toux ou un mal de gorge, ce symptôme disparaît généralement avec la guérison. Repos, hydratation et traitements symptomatiques suffisent dans la majorité des cas. Si le goût persiste après la disparition des autres symptômes, une investigation complémentaire est nécessaire.
Médicaments : une liste d’effets indésirables sous-estimée
De nombreux traitements sont responsables de dysgueusie. Parmi eux : certains antibiotiques (comme la métronidazole), les antihypertenseurs (bêta-bloquants, inhibiteurs de l’ECA), les antidépresseurs, les traitements thyroïdiens ou encore les compléments en fer et en zinc. Ces molécules traversent la salive et interagissent avec les papilles gustatives. Le goût métallique apparaît souvent en quelques jours suivant le début du traitement. Ne cessez jamais un médicament sans avis médical. En revanche, parlez-en à votre médecin. Une alternative thérapeutique existe souvent, tout aussi efficace mais sans cet inconvénient sensoriel.
Reflux gastro-œsophagien : quand l’estomac remonte en bouche
Les reflux gastro-œsophagiens (RGO) sont une cause fréquente de goût anormal. L’acidité gastrique remonte jusqu’à l’œsophage et parfois dans la cavité buccale. Elle irrite les muqueuses et libère des composés volatils perçus comme métalliques. Associé à des brûlures d’estomac, des ballonnements ou une régurgitation, ce symptôme doit alerter. L’adoption de bonnes habitudes — repas légers, fractionnés, éviction des aliments gras ou épicés, lever de la tête du lit — aide à limiter les remontées. Un traitement à base d’antiacides ou d’inhibiteurs de la pompe à protons peut être prescrit par un gastro-entérologue.
Grossesse : un bouleversement hormonal aux effets surprenants
Pendant la grossesse, surtout au premier trimestre, de nombreuses femmes rapportent un goût métallique persistant. Ce phénomène est lié aux fortes variations hormonales, notamment de l’œstrogène, qui modifient la sensibilité des récepteurs gustatifs. Il s’accompagne parfois d’aversion pour certaines odeurs ou d’envies alimentaires inhabituelles. Dans la majorité des cas, le symptôme disparaît spontanément après le troisième mois. Pour certaines patientes, il persiste jusqu’à l’accouchement. Aucun traitement spécifique n’est requis, mais une bonne hydratation et une alimentation équilibrée peuvent atténuer la sensation.
Chimiothérapie et radiothérapie : un effet secondaire connu
Les patients sous chimiothérapie ou radiothérapie cervico-faciale connaissent fréquemment une altération du goût. Les cellules des papilles gustatives, très prolifératives, sont sensibles aux agents cytotoxiques. Cela provoque une dysgueusie métallique, souvent accompagnée d’une sécheresse buccale. Ce phénomène est généralement transitoire et s’estompe quelques semaines après la fin du traitement. Des solutions buccales apaisantes, une alimentation adaptée et une stimulation sensorielle (citron, herbes fraîches) peuvent aider à mieux le supporter.
Intoxication aux métaux lourds : une urgence médicale
Un goût métallique constant peut trahir une intoxication au plomb ou à d’autres métaux lourds (mercure, cadmium). Cette situation est rare mais grave. Elle concerne particulièrement les enfants vivant dans des logements anciens avec peintures au plomb ou canalisations non conformes. Les symptômes incluent fatigue, douleurs abdominales, troubles neurologiques. Le diagnostic repose sur un dosage sanguin. Le traitement consiste à éliminer la source de contamination et à administrer des chélateurs sous supervision médicale stricte.
Sécheresse buccale et troubles neurologiques : des causes moins visibles
La sécheresse buccale (xérostomie) altère la qualité de la salive, essentielle à la perception des goûts. Elle peut résulter du vieillissement, du stress, de certains médicaments ou de maladies auto-immunes comme le syndrome de Sjögren. De même, des affections du système nerveux — sclérose en plaques, paralysie de Bell, dépression — peuvent perturber les voies gustatives centrales. Dans ces cas, le traitement cible la maladie sous-jacente. La stimulation de la salivation (chewing-gum sans sucre, eau, bains de bouche) apporte un soulagement symptomatique.